MINIMALISTE, MAXI QUESTION

Qu’on se le dise, on a tous du mal à jeter, en revanche, aucun problème pour accumuler, au fur et à mesure des années, des objets auxquels on tient,… ou pas! Même les plus fervents minimalistes sont un jour tombés dans la saturation, pour s’en détourner tout à coup  brutalement, un peu comme de grands fumeurs disent un jour NON à la cigarette… et à tous les fumeurs non repentis.

Alors, le Minimalisme, c’est un style ou une philosophie?

Et peut-on raisonnablement faire un peu de vide autour de soi, sans pour autant tomber dans l’ascétisme le plus austère? D’ailleurs, en cas de « révélation », comment procéder?

L’IDEE DU « VIVRE MIEUX AVEC MOINS » N’EST PAS NEUVE

Issue du Bauhaus, elle rencontre un écho favorable pendant les années 60 avec le consumérisme galopant et l’apogée du pop art. Aujourd’hui, elle est à nouveau en plein boum et s’invite par exemple dans de nombreux programmes de développement personnel.

L’objectif? Arrêter d’accumuler et de surconsommer frénétiquement, se débarrasser de ses possessions superflues pour se sentir plus libre et plus épanoui. La question peut sembler plus que pertinente dans une période où les préoccupations environnementales sont omniprésentes, et les pressions et le stress sont quotidiens pour de nombreuses personnes.

Montrer que l’on maîtrise sa consommation: quelques meubles, peu de bibelots… de la fonctionnalité

Pour ses détracteurs, le minimalisme induit d’abord l’austérité et l’absence de personnalité; en fait, c’est plus compliqué si on gratte un peu: ce goût prononcé pour les intérieurs dépouillés n’est pas un objectif en soi, mais inversement, un moyen par lequel on va concrétiser cette fuite du stress et de l’accumulation. Le chemin qui conduit au « style minimaliste » est long, car réfléchi. Il n’est que la partie visible d’un travail sur soi, où le vide n’a plus forcément besoin d’être rempli.

A ce titre, on le considèrera donc plutôt comme un art de vivre, s’appliquant à tous les domaines de la vie quotidienne des personnes le pratiquant, et donc naturellement aussi… à la décoration.

TROP DE DECO TUE LA DECO

Notre oeil capte tout ce qu’il voit… et finit par ne plus rien voir s’il a trop de choses à « scanner ». Il en tire instantanément une impression de confusion. En faisant du vide (un peu) et en mettant en valeur quelques objets choisis et triés, la décoration devient pourtant plus percutante, plus qualitative aussi. Qui n’a jamais ressenti la sensation d’espace et l’harmonie qui se dégagent d’un intérieur minimaliste? Bien sûr, notre tendance naturelle est de nous attacher aux objets que nous possédons, à fortiori s’ils ont une histoire; difficile de s’en détacher tant ils représentent à nos yeux une charge économique et émotionnelle! Sur quels critères faudrait-il donc s’en séparer, et pour quel bénéfice?

quelques objets soigneusement choisis, et la décoration devient plus percutante

L’approche minimaliste nous propose de nous interroger sur l’utilité et sur l’esthétique, et de rechercher l’harmonie sur la base de ces 2 seuls critères: est-ce que cet objet me sert vraiment, ou est-ce qu’il m’apporte une joie particulière quand je le regarde? Et si la réponse est non dans les 2 cas… alors, PAS de pitié!

Car il y aura toujours une petite voix au fond de nous pour nous rappeler que « on ne sait jamais… », « et si un jour… ».Pour passer cette étape sereinement, je dirais simplement qu’il ne faut pas se mentir, et surtout, déculpabiliser. Ensuite le temps fera le reste, tiroir après tiroir, placard après placard! Un bon déménagement donnera également un sérieux coup de pouce… Est-ce que j’ai vraiment besoin de ces 4 carafes à vin, cadeaux amassés au fil des années, alors que je ne m’en sers jamais, même quand je reçois des amateurs à ma table? Que dire de ces petites robes achetées compulsivement, quasiment jamais portées et conservées « au cas où »?

En y regardant bien, c’est pareil à tous les étages… Mais une fois le premier pas effectué, le désencombrement paraît comme un jeu, et il doit le rester, surtout pas se transformer en contrainte! Comme après une bonne séance de fitness, on se sent bien, après… plus light. Mais la comparaison s’arrêtera là.

des espaces bien définis et lisibles, de la clarté… le crédo du minimaliste

CONCEVOIR UN ESPACE MINIMALISTE

De la même façon que le crayon est le prolongement de la main et de notre pensée, à mon avis, la décoration minimaliste ne se conçoit bien que dans ce processus de désencombrement amorcé… On s’y sent mieux aussi parce qu’on a peut-être fait ce cheminement.

On retrouve quand même des caractéristiques propres à une déco minimaliste:

  • l’importance accordée aux rangements: en rangeant, les objets « ont une place », ils disparaissent de la vue et ne sortent plus que lorsqu’on a besoin d’eux. (il y a même encore des places vides!)
  • la fonctionnalité: elle va de paire avec le rangement. Chaque mètre carré doit être optimisé pour donner une impression de fluidité des espaces et faciliter les circulations. Dans l’idée, on préfère aussi le mobilier intégré et toute hauteur: ni creux ni bosse. les lignes se fondent davantage avec l’horizon.
  • la part belle accordée à la lumière naturelle: amplifiée par des surfaces claires, elle doit pouvoir se répandre dans tous l’espace, aussi petit soit-il, sans se heurter à des objets encombrants.
  • l’utilisation de matériaux naturels et de tons plutôt neutres, plus reposants pour le regard: à la couleur en soi, on préfère jouer sur les différences de textures et leur reflet pour apporter du relief. On évite les contrastes trop marqués, les fioritures, l’excès de courbes extravagantes compliquées à « lire », les bibelots entassés… bref, tout ce qui surcharge.
le minimalisme trouve sa raison d’être dans les petits espaces, où le rangement intégré est indispensable

Heureusement, être minimaliste, ce n’est pas que « faire le vide autour de soi »

C’est par exemple aussi faire le choix d’un fil conducteur permettant de centrer ses recherches, ses achats… autour d’une idée ou d’un concept décoratif, ce qui évite ensuite de s’éparpiller.

A ce stade, les petits cadeaux de nos chers bambins, nos souvenirs de vacances en Italie, et autres trouble-fête nous compliquent régulièrement la tâche: leur dédier un emplacement limité et mettre en place une rotation permettra (peut-être) d’en contrôler la prolifération…

C’est encore « less is more », en avoir moins mais de meilleure qualité… et ne conserver que les objets chargés affectivement, indispensables ou apportant une esthétique (objective!) à la pièce. Et pourquoi ne pas adopter, comme en comptabilité, la règle « une entrée = une sortie », pour s’assurer de ne plus se laisser à nouveau déborder? Un peu radical, certes. Sujets trop sensibles, s’abstenir.

mettre en valeur quelques objets ayant une valeur affective pour personnaliser son intérieur

MON MINIMALISME A MOI

Clairement, si j’ai choisi ce sujet d’article, c’est que je me sens fascinée par le lien entre notre approche de la propriété et notre quête du bien-être. Faut-il « amasser » pour être heureux? Montrer tout ce que l’on possède? Ou au contraire se détacher davantage de l’aspect matériel pour mieux se recentrer sur notre connaissance du monde, des autres, de nous-mêmes…? question philosophique, sans aucun doute, voilà c’est dit.

Introduire un peu de minimalisme dans nos vies peut apparaître comme salvateur à de nombreux  égards. Cependant, le plus important, à mes yeux, est de rester libre et clairvoyant. Libre de peindre un mur en bleu cobalt, même si ça ne colle pas aux canons minimalistes. Libre de ne pas ranger le cooking chef et de le laisser trôner sur le plan de travail même s’il ne sert pas tous les jours. Libre de ne pas tomber dans le rangement systématique et la maniaquerie caractérisée… car une maison est avant tout un lieu de vie. Rester clairvoyant, c’est savoir capter à quel moment ce débordement de vie commence à nous peser et nécessite notre reprise en main.

l’harmonie du bon dosage.

minimalisme peut rimer aussi avec couleur et contraste…